Corse

Journée Annuelle 2025 à Pigna

Le vendredi 27 juin 2025, à Pigna, s’est tenue la Journée Annuelle des Architectes. Vous trouverez ci-dessous le discours d’ouverture prononcé par la présidente Sylvia Ghipponi, ainsi qu’un retour en images sur cette journée rythmée par plusieurs moments forts.

Publié le
, mis à jour le
8 août 2025
Conférence d'Alia Bengana

Conférence d'Alia Bengana

CROA CORSE

Discours d'ouverture de la présidente Sylvia Ghipponi

Monsieur le Maire de Pigna, Jérôme Casalonga, merci pour votre accueil.

Merci à vous tous d’avoir répondu présent à notre invitation.

Après la visite du chantier de l’Espace Culturel à Corbara, que nous venons de découvrir avec les agences A Fabrica et CGZ Architecture, en présence de Monsieur le Maire Paul Lions, c’est un plaisir de nous retrouver à l’auditorium de Pigna.

Cette œuvre de l’agence CFL Architectes, dont le conseiller François Casalonga est associé, et de Paul Casalonga, via l’agence Studie, dont faisait également partie le conseiller François-Xavier Bartoli, a été livrée il y a 25 ans, inspirée des constructions en terre crue d’Hassan Fathy, qui avait participé à un colloque organisé en son honneur en Balagne, à Alzipratu, en 1979.

Un lieu emblématique, exceptionnel, dans un village tout aussi exceptionnel, pour prolonger et conclure notre journée annuelle.

On vous présentera tout à l’heure, en assemblée générale, notre rapport d’activités.

Puis on aura le plaisir de recevoir et d’assister à une conférence d’Alia Bengana, marraine de la promotion des nouveaux architectes inscrits en 2024-2025, qui prêteront serment.

Nous avons souhaité faire de cette journée annuelle un grand moment de partage d’expériences et d’échanges. L’occasion aussi, pour l’Ordre des Architectes de Corse, d’échanger sur nos actions, de poser un regard sur notre métier, et d’accueillir les nouveaux architectes.

« L’architecture est une expression de la culture ». C’est comme ça que commence l’Article 1er de la loi de 1977 sur l’architecture.

Poursuivons par la deuxième phrase de ce premier article : « La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. Les autorités habilitées à délivrer le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir s’assurent, au cours de l’instruction des demandes, du respect de cet intérêt ».

La loi de 1977 sur l’architecture consacre l’intervention des architectes dans l’acte de bâtir. Voilà pourquoi l’Ordre des Architectes existe. Pour être considéré comme architecte, il faut porter le titre. Pour être admis à porter le titre, il faut être inscrit à l’Ordre.

L’ordre veille ensuite à l’application de loi, c’est ce qu’on appelle les missions régaliennes. Cela inclut la tenue du tableau, en procédant aux inscriptions-radiations, et pour les inscrits, le contrôle des assurances, de la formation, des déclarations de projet, des liens d’intérêt, et du respect de notre code de déontologie.

Au-delà de ces missions régaliennes, l’Ordre joue aussi pleinement son rôle de représentation de la profession, tout au long de l’année, auprès des diverses instances locales et des partenaires, et travaille à faciliter l’exercice de la profession.

A la question « que fait l’Ordre ? », voici donc déjà quelques pistes concrètes pour ceux qui ne connaissent pas bien nos actions.

Nous détaillerons cela en assemblée générale avec l’ensemble du conseil tout à l’heure.

Mais avant, j’aimerais vous parler plus largement des architectes qui composent notre tableau en Corse.

 

« Archigraphie 2024 ». L’année 2024 s’est achevée avec la diffusion, en décembre, par le Conseil National de l’Ordre des Architectes, d’une nouvelle « Archigraphie », qui tous les deux ans, propose une vision panoramique de la profession d’architecte pour « mieux connaître et comprendre les changements et évolutions qui la traversent ».

Cette « Archigraphie 2024 » présente plusieurs analyses.

Au niveau national, on y apprend que le marché du BTP se polarise de plus en plus autour du bâtiment (78%), que le marché du bâtiment est en hausse de 28% entre 2020 et 2022, et que l’entretien et la rénovation en concentrent la plus grande part (42%), par rapport au neuf (36%).

Le montant des travaux réalisés par les architectes a augmenté de 16% entre 2020 et 2022. Pourtant, le taux de pénétration moyen des architectes dans l’ensemble du secteur du bâtiment repart à la baisse depuis 2020. 

Au niveau national toujours, les montants de travaux hors logement déclarés par les architectes sont plus importants que ceux des logements.

Concernant les logements, on note une progression des montants de chantiers collectifs. Le poids des architectes dans la construction de maisons individuelles reste faible, se maintenant autour de 5%, avec une surface moyenne des maisons qui se maintient autour de 122 m², et un prix moyen au m² de 1 726 € qui confirme sa progression.

L’étude nous dit aussi, et c’est important de le rappeler, que les travaux de rénovation déclarés par les architectes sont plus nombreux (62%) que ceux de la construction neuve, mais de montants moindres. Pourtant, ces projets sont aussi complexes, voire plus, et aussi longs, voire plus longs. Il y aurait donc une perte économique notable pour la profession, et des actions devront être prises pour résorber cette perte. Je pense notamment à un plus grand recours à la rémunération au forfait, plutôt qu’au pourcentage.

Le document présente également une analyse territoriale de la profession et des perspectives à l’horizon 2030.

Alors, que retenir de cette « Archigraphie 2024 » pour la Corse ?

Rappelons tout d’abord que, sur les 17 conseils régionaux, la Corse fait partie des petits conseils, avec les Outre-mer. Sur les près de 30 000 architectes inscrits au niveau national, la Corse en compte 285 début 2024. Nous en comptons exactement 299 aujourd’hui, soit près de 1% du total des inscrits.

 

Carte 1

Petit conseil, mais qui présente, et nous l’avions déjà dit, une densité très forte d’architectes. En 2024, alors que Paris concentre 1/6ème de la totalité des architectes inscrits (un tiers en Ile-de-France), et la plus forte densité avec 25 architectes pour 10 000 habitants, c’est la Corse-du-Sud qui arrive en 2ème position avec 9,8 architectes pour 10 000 habitants. Deux départements qui montrent une concentration beaucoup plus élevée que les autres, la moyenne nationale étant à 4 architectes pour 10 000 habitants avec des départements qui en comptent moins de 1.

 

Carte 3

Pour les auteurs de ce document, cela témoigne de l’attractivité économique de la Corse pour la profession. Ils précisent qu’à Paris, la forte densité s’explique par « la concentration d’ouvrages patrimoniaux, mais aussi des secteurs hors logement tels que l’hôtellerie qui est le plus gros pourvoyeur de travaux d’architecture hors logement après le secteur justice-sécurité ». Concentrations de patrimoine, d’hôtellerie… sont-elles également valables pour justifier la forte densité en Corse ? La question est posée.

Concernant les catégories d’âges, on relève une concentration d’architectes de moins de 50 ans sur le littoral atlantique, autour de Lyon et en Corse. La Corse affiche la médiane d’âge la plus basse (47 ans).

 

Carte 4

De façon générale, les jeunes sont effectivement davantage présents le long des côtes, aux frontières, et dans les grandes métropoles. Mais pour expliquer la forte proportion de jeunes inscrits en Corse, nous devons aussi peut-être prendre en compte l’absence d’école d’architecture. Nos jeunes qui partent 5 ou 6 ans minimum pour leurs études, reviennent peut-être plus vite une fois diplômés, et s’installent aussi peut-être plus vite à leur compte, compte-tenu de la structure économique de l’île qui emploie très modérément.

 

Carte 5

Concernant les revenus, et en particulier ceux des libéraux, le revenu moyen annuel est de 43 959 € en Corse, parmi les plus bas après l’Occitanie, la Nouvelle-Aquitaine, et la Bourgogne-Franche-Comté. Ces chiffres de l’Archigraphie 2024 sont ceux de 2022.

 

Carte 10

Ce revenu moyen était établi à 54 410 deux ans plus tôt, en 2020. Et 55 396 € en 2018. On a donc perdu plus de 10 000 € de revenu annuel, et ce qui représente 1/5, en 2 ans.

Le revenu médian, quant à lui, est le 2ème le plus bas après l’Occitanie, avec 27 686 €.

Les régions où l’écart entre le revenu moyen et médian est le plus marqué, comme la Corse (57 %), les Hauts-de-France et l’Île-de-France (56 %), « témoignent d'une distribution des revenus plus polarisée, avec une concentration importante des revenus les plus élevés au sommet de la distribution. » Nous l’avions déjà souligné il y a deux ans.

 

Graphique 79

L’étude nous indique ensuite que la Corse a enregistré entre 400 et 600 transactions immobilières pour 10 000 habitants, ce qui est un taux assez faible par rapport aux autres régions.

 

Carte 13

Pour les travaux impliquant l’architecture, leur valeur en Corse se situe dans la moyenne basse, entre 100 et 200 millions d’€.

 

Carte 15

Mais le montant moyen des travaux se situe lui dans la moyenne haute, avec une moyenne comprise entre 250 000 et 300 000 € par projet.

 

Carte 16

Le taux de croissance annuel moyen du nombre de projets est par ailleurs parmi les plus élevés en Corse, avec un taux de plus de 10% entre 2020 et 2022.

 

Carte 18

L’étude considérant maintenant que « le nombre d’architectes par département semble étroitement corrélé à deux facteurs déterminants : le dynamisme économique, mesuré par le nombre d’entreprises, et la composition démographique reflétée par le nombre de ménages », qu’en est-il en Corse ?

La Corse-du-Sud compte moins de 150 entreprises par architectes, et la Haute-Corse, entre 150 et 200 entreprises par architecte.

 

Carte 21

Par ailleurs, Haute-Corse et Corse-du-Sud comptent chacune moins de 800 ménages par architectes, ce qui fait de la Corse une exception notable, avec une densité particulièrement faible, mais où le nombre de ménages par architectes est singulièrement bas.

 

Carte 23

Enfin, le taux de croissance projeté du nombre de ménages entre 2020 et 2030 est de l’ordre de 13,1% en Haute-Corse, et 8-10% en Corse-du-Sud.

 

Carte 24

L’ensemble de ces données permet aux auteurs de l’étude d’évaluer la projection de la demande en architecture, tenant compte de plusieurs variables clés démographiques et économiques.

 

Carte 25

Alors que « certains départements présentent des caractéristiques communes telles qu’un faible nombre d’architectes, une densité architecturale réduite par rapport à leur population, ainsi qu’un âge médian élevé parmi les architectes en exercice » qui sont susceptibles de mener à une pénurie d’architectes, ce n’est absolument pas le cas de la Corse, vous l’avez compris, qui ne présente aucun risque pour le déficit d’ingénierie architecturale.

Conjuguée à l’augmentation du nombre de ménages, à l’attractivité des régions, mais aussi à la superficie des territoires pour éviter une concentration excessive d’architectes dans des zones à faible densité de population, l’« Archigraphie 2024 » présente la Corse comme une région qui devra plutôt connaître une décroissance notable du nombre d’architectes à l’horizon 2030, d’au moins 6% par an, pour éviter une saturation du marché.

A l’échelle de notre conseil, avec 285 architectes inscrits fin 2023, cela signifierait que cette décroissance annuelle de 6% devrait être d’au moins 17 architectes en 2024, puis 16, 15, etc… jusqu’à atteindre 185 inscrits en 2030.

Conclusion inquiétante… D’autant plus qu’en 2024, le nombre d’inscrits en Corse est passé de 285 à 298 fin 2024, soit une croissance de 4,5%.

C’est pourtant à mon avis une erreur de présenter les choses comme ça, et le Conseil National de l’Ordre des Architectes a aussi rappelé que les architectes sont nécessaires plus nombreux, partout.

Mais on ne peut nier qu’il sera essentiel, comme le suggère l’« Archigraphie 2024 », d’engager une réflexion approfondie sur nos particularités territoriales.

Ces projections, nous disent les auteurs, « guideront les nouveaux diplômés, aideront les architectes en difficulté et soutiendront ceux cherchant à changer de cadre de travail, ou souhaitant créer des filiales dans ces territoires moins pourvus, assurant ainsi une répartition plus équitable des professionnels de l’architecture en France ».

Faut-il donc que nous travaillions davantage à l’export ? Notamment pour combler les déficits que connaissent les « déserts architecturaux », ou d’autres régions très dynamiques comme le nord. Export à l’international aussi ? Peut-être.

Faut-il diversifier davantage nos activités ? Certainement. Alors que la maîtrise d’œuvre et la conception de projets constituent plus de 90% de l’activité principale des inscrits, d’autres activités pourront monter en puissance. On peut en citer quelques-unes : suivi de chantiers, conseil, assistance à maîtrise d’ouvrage, programmation, montage d’opérations, expertise, contrôle, sécurité, communication, enseignement, formation, recherche, promotion, commercialisation, construction, urbanisme, paysage, environnement, design… Les manières de faire l’architecture sont nombreuses et variées.

Notre profession a toujours accompagné les mutations de nos sociétés, en se transformant elle-même. Notre adaptation est aujourd’hui encore nécessaire. Nous construirons moins, mais nous ferons de l’architecture quand même.

C’est dans ce sens que nous travaillons aussi au conseil pour proposer une offre de formation en cohérence avec ces mutations.

Réfléchissons-y ensemble, et organisons-nous pour nous y préparer au mieux.

Voilà un programme conséquent et stimulant pour la suite !

Je vous remercie pour votre attention, et, au nom du Conseil de l’Ordre des Architectes de Corse, je vous souhaite une très bonne journée avec nous !

 

Sylvia Ghipponi

Présidente du Conseil de l’Ordre des Architectes de Corse


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Visite de chantier
Visite de chantier
Visite de chantier
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Ouverture de la Journée
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Assemblée Générale
Assemblée Générale
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Conférence d'Alia Bengana
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Prestation de serments
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Casa Musicale
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