Disparition de l’architecte Lucien Kroll

Né en 1927 à Bruxelles, Lucien Kroll se forme à l’École nationale supérieure des arts visuels de La Cambre, dont il est diplômé en 1951. Cinq ans plus tard il rencontre sa femme Simone, potière et paysagiste, avec laquelle il fonde l’atelier d’architecture et d’urbanisme Simone et Lucien Kroll en 1958.

L’œuvre emblématique de Lucien Kroll est la MéMé, la maison médicale sur le campus de l’Université de Louvain qui est complétée dans les années qui suivent, d’un ensemble de bâtiments (école, restaurant, mairie, station de métro, …). La conception de ce manifeste, entamée en 1968, a été menée à chaque étape avec la participation des étudiants. Le projet a fait scandale par son esthétique anarchique, faite de formes et de matériaux hétéroclites, et a même été interrompu. Les bâtiments comportent des cloisons mobiles, permettant aux utilisateurs de modifier leur agencement.

A partir de la fin des années 70, Lucien Kroll poursuit sa carrière à l’étranger et surtout en France où il conduit de nombreux projets avec l’implication des habitants, comme la réhabilitation du quartier de la Perseigne à Alençon, ou le quartier des Vignes blanches à Cergy-Pontoise avec ses quarante-trois maisons différentes.

Lucien Kroll opposait radicalement au modernisme et au fonctionnalisme une architecture organique, traitée comme du vivant. Sa méthode « incrémentale » se présentait comme « une façon écologique de décider », incluant les « ratés » dans des projets potentiellement jamais achevés.

Sa pratique de la rénovation, notamment des ensembles de logements, consistait à rompre leur standardisation, sans démolir. Avec le concept de « vicinitude », qu’il invente, il cherche à redéfinir des rapports de voisinage dépassant l’individualisme pavillonnaire.

En 2015, la Cité de l’architecture et du paysage avait consacré à Lucien kroll une exposition : "Tout est paysage, une architecture habitée : projets et réalisations de Simone et Lucien Kroll".

La radicalité de Lucien Kroll, qui l’amenait à s’immerger dans les quartiers où il intervenait, en fait à bien des égards un précurseur pour penser les enjeux écologiques et sociaux de notre temps.

Le Conseil national de l’Ordre des architectes souhaitait revenir sur cette disparition qui a eu lieu au cœur de l’été. Une figure emblématique de la profession nous a quittés.